19 Jan Intelligence collective

La force de l’assemblée citoyenne est fondée sur le principe de l’intelligence collective. Même avec une parfaite connaissance de la problématique, chacun de nous ne peut avoir qu’un angle de d’approche : le sien. C’est de la pluralité des points de vue que naît la solution.
Intelligence collective
Définition
L’intelligence collective reflète la capacité intellectuelle d’une communauté d’individus. Elle est issue des interactions entre ses membres et permet d’effectuer des tâches complexes grâce aux synergies réalisées.
L’intelligence collective suppose le partage de l’information, le respect de règles communes, de nombreuses relations sociales, et un bénéfice à collaborer pour chacun des membres.
Seul on va vite, ensemble on va loin
L’intelligence collective fait converger l’intelligence et les connaissances d’un groupe afin d’atteindre des buts communs. Les groupes faisant preuve d’intelligence collective ont une intelligence bien supérieure à la somme des intelligences individuelles de ses membres.
« Aucun de nous n’est aussi malin que nous tous », proverbe japonais
On peut se représenter l’intelligence collective par exemple sous la forme d’une équipe de joueurs de football. Ces derniers doivent mobiliser toutes leurs compétences et mettre en commun leurs énergies pour accomplir des objectifs et donner le meilleur d’eux-mêmes. Chaque individu devra trouver sa place pour apporter sa pierre à l’édifice et contribuer à cette forme de réflexion commune.
Pour atteindre les objectifs, il est impératif que chacun soit différent par ses connaissances, ses compétences, sa culture, sa façon d’aborder les problèmes. Plus les participants sont pluriels plus les possibilités d’enrichissement du groupe sont grandes.
Pour permettre le développement de l’intelligence collective, il faut savoir constituer un groupe composé d’individus ayant des compétences complémentaires, se faisant confiance, autour d’un projet commun aux objectifs partagés par tous.
Plusieurs conditions doivent exister préalablement à la collaboration :
- Une adhésion à des buts communs
- La compréhension de l’objectif partagé
- Une confiance mutuelle entre les membres : confiance dans les compétences de chacun et dans les informations échangées, mais aussi confiance dans le groupe, savoir qu’« ensemble on est capable de…. »
- Une complémentarité de compétences: chaque membre a une connaissance d’un aspect, que les autres n’ont pas, et chacun sait qui est compétent dans tel ou tel domaine.
En termes de composition du groupe, voici les critères idéaux :
- Un groupe pas trop nombreux (de 4 à 7 personnes idéalement)
- Un groupe au niveau de connaissances diversifié. Les expériences ont montré que les plus mauvais résultats étaient obtenus par des équipes exclusivement à haut potentiel.
- Des styles de pensée différents, sans être trop opposés, et un minimum de points communs et d’affinités (sans nécessité d’une cohésion importante)
- Un groupe où est présente l’intelligence émotionnelle (26% de l’intelligence collective est liée à la présence de personnes intelligentes émotionnellement)
- Un groupe où sont présentes des femmes (23% de l’intelligence collective est liée à la présence de femmes)
- Pas de présence d’une personne « dominatrice » qui empêche l’expression
- Un animateur impartial qui permet à chacun de s’exprimer à tour de rôle, de manière équitable et distribuée et qui encourage les doutes.
L’efficacité sera visible au fait que :
- L’équipe réalise les tâches de façon fluide et efficace
- Il y a peu de malentendus
- Il faut rarement revenir sur ses pas dans la réalisation des tâches.
Facilateur
Le groupe doit tendre vers un objectif bien défini et tenter d’apporter des réponses à des questions clairement formulées. Il doit également adopter un langage commun et avancer dans la même direction. Il faut que les personnes réunies soient animées par la même envie de faire aboutir le projet.
Le facilitateur doit alors mobiliser l’équipe et faciliter sa réflexion: c’est par la mise en commun des compétences et des efforts que l’on observe des résultats impressionnants.
Le facilitateur doit toujours rester à l’écoute de chaque membre du groupe et ne possède pas d’attentes préétablies afin d’être capable de déceler le potentiel de chaque nouvelle idée.
Ce groupe doit être animé, managé afin de favoriser :
- une coopération efficace
- la motivation et l’engagement des participants
- la différenciation des tâches claire et acceptée par tous
- l’expression de tous
- la reconnaissance des apports des membres
La personne en charge de l’animation du groupe, veillera à ne souscrire d’emblée à aucune position, encouragera tous les participants à faire preuve de sens critique et de « dissidences » et incitera à travailler sur la base d’informations communes. Ceci implique d’autoriser les conflits, sous réserve que des règles de base soient respectées : écoute, bienveillance et tolérance. On peut ne pas être d’accord mais on va l’exprimer avec respect. Il peut être intéressant de donner à un membre du groupe le rôle d’avocat du diable puis de demander à des experts externes d’évaluer les décisions prises.
L’apport des neurosciences
Ce qui influence le plus le développement de notre système nerveux, ce sont les liens avec les autres êtres humains : nos apprentissages se font essentiellement par le biais de l’imitation, les comportements se développent ou non selon qu’ils sont favorisés ou punis par la société. Ainsi, des enfants « sauvages », isolés des contacts humains pendant des années, n’ont pas pu développer des compétences humaines « normales », notamment au niveau de la communication, du langage, faute de modèles adéquats.
Selon les neurosciences,
« pour qu’un cerveau fonctionne, il lui faut au moins
un autre cerveau pour se développer »
Des enfants placés en situation d’isolement et de carence affective (exemple en orphelinat) présentent des atrophies neuronales importantes. La bonne nouvelle est que cette atrophie est réversible (merci la neuroplasticité) : après un an en placement en famille d’accueil, entourés d’affection, la majorité des orphelins présentent une modification de leur cortex, dans le sens d’un développement favorable.
Les neurosciences ont pu démontré également, grâce au concept des « neurones miroirs », que nous étions constitués pour entrer en empathie avec les autres. Voir quelqu’un se coincer les doigts dans un tiroir active la même zone neuronale que si nous nous étions nous-même coincés les doigts. C’est, entre autres, cette capacité qui nous permet d’identifier les émotions que ressentent nos congénères
Nous sommes des « animaux sociaux »
C’est l’aptitude à coopérer qui a constitué la clé de la survie humaine (pour chercher de la nourriture, repousser les prédateurs, nourrir les enfants…) et non la supériorité (physique ou intellectuelle) d’individus isolés.
De tout temps, il a fallu équilibrer les avantages du groupe et ses inconvénients (concurrence pour la nourriture, le partenaire sexuel, rapport de hiérarchie et de domination).
La coopération est donc une aptitude naturelle, voire vitale.
Si « l’intelligence humaine dépend des connexions neuronales, l’intelligence organisationnelle dépend des connexions interpersonnelles ».
Le groupe est plus intelligent, plus performant que la somme des individus qui le constitue.
De nombreuses expériences ont mis en évidence un effet de facilitation sociale : la présence des autres améliore les performances. Les cyclistes enregistrent de meilleurs temps quand ils courent en groupe plutôt que seuls ; des sujets résolvent plus rapidement des multiplications simples et les tâches d’exécution simples sont plus précises quand les personnes sont en groupe.
Pour résumer, un effet facilitateur du groupe va être observé quand la tâche est difficile, attrayante ou captivante, quand on pense que les coéquipiers ne sont pas aussi performants que nous, ….
Exemples
L’équipe de conception de la voiture Lincoln Continental :
Le budget initialement prévu à 750 millions d’euros a été de 250 millions d’euros, là où traditionnellement il y a dépassement de budget.
Le projet a été bouclé avec un mois d’avance mois d’avance (… en ayant démarré avec 4 mois de retard) alors qu’il y a habituellement 3 à 4 mois de retard sur ce type de projet.
En termes de qualité, cela a été là aussi un succès avec 99% d’éléments parfaitement au point versus habituellement 50%.
On peut trouver également des applications dans la vie politique :
Dans la petite ville japonaise d’Iwate, 8 810 habitants, les usines fermaient les unes après les autres. Le maire, Hiroya Masuda, eut alors l’idée, en 2001, d’inviter ses administrés à rassembler leurs idées dans des « boites à suggestions » pour faire de leur cité une « slow city » (ville lente), « où les gens rentrent tôt à la maison, se promènent en famille et bavardent avec leurs voisins ». En moins de dix ans, Iwate est devenue n°1 en tourisme vert et en énergies renouvelables.
Au niveau national une consultation est actuellement en cours sur « apprendre demain » et qui a comme objectif de recueillir, débattre et approfondir des propositions permettant d’organiser et coordonner des politiques de recherche et développement dans le domaine de l’éducation et de l’apprentissage tout au long de la vie.